Nous voici de retour pour un nouvel épisode de notre rubrique « Connaissez-vous vraiment les armements français » en compagnie de Régis ADNET, Président de GAZOCEAN, qui nous a fait l’honneur de nous recevoir dans leurs nouveaux bureaux marseillais. GAZOCEAN fait partie des armements historiques et emblématiques du paysage français, pour autant le modèle a beaucoup évolué ! Bienvenue dans le monde demain avec le référent français du transport de GNL !
Aymeric AVISSE : Bonjour Régis, je suis ravi d’être reçu dans les tout nouveaux bureaux marseillais de Gazocéan, pour cette nouvelle rubrique de « Connaissez-vous vraiment les armements français ? » . Vous êtes donc le Président de Gazocéan mais également un ancien élève de l’ENMM. Pouvez-vous nous expliquer votre parcours et nous présenter Gazocéan aujourd’hui ?
Régis ADNET : Bonjour Aymeric, je suis effectivement Président de Gazocéan depuis maintenant un an, j’ai suivi une formation de C1NM à l’école de Marseille promotion 1987, et parmi mes tout premiers embarquements j’ai navigué en tant qu’élève chez Gazocéan, sur justement ce navire derrière moi, le Descartes, qui à l’époque effectuait des rotations entre l’Algérie et la France, mais ça c’est le passé ! Aujourd’hui Gazocéan c’est une flotte de neuf navires dont huit sous pavillon français au Registre International Français (RIF). Sept de ces navires effectuent du trading international donc au tramping mondial et sont très récents : 6 sont sortis entre 2020 et 2022 des chantiers coréens.
Aymeric AVISSE : Gazocéan transporte du GNL : pouvez-vous nous présenter le panel français des transporteurs de gaz car entre Géogas, Marima, Knutsen; les armements sont très présents : comment se positionne chacun de vous dans ce marché français ?
Régis ADNET : Gazocéan est effectivement spécialisé dans le GNL et ne fait QUE du GNL. Dans le paysage du gaz français Gazocéan c’est l’historique du gaz au niveau français et nous sommes toujours les premiers sur cette activité. Nous sommes associés avec notre actionnaire Géogas (qui est à l’origine de Gazocéan), qui possède et arme des navires LPG, des petits et des grands navires sous pavillon étranger et français, dont la gestion est assurée par V SHIP France à Nantes, avec du personnel officier français employé par Marima qui est une société 100% Géogas.
Aymeric AVISSE : Donc des entreprises complémentaires avec des intérêts communs ?
Régis ADNET : Tout à fait ! Des intérêts communs voir même complémentaires car des officiers Marima peuvent être amenés à venir chez nous et inversement.
Aymeric AVISSE : il y a donc une porosité entre les armements.
Régis ADNET : Exactement ! Pour terminer avec ce panorama, nous avons également Knutsen, qui est un nouveau venu dans le paysage français.
Aymeric AVISSE : Concernant les derniers navires que vous venez de recevoir, qui ont été construits en Corée, nous sommes sur du transport à pression atmosphérique, donc liquéfié.
Régis ADNET : Nous sommes sur du transport de Gaz Naturel Liquéfié, donc le produit est transporté à -162°C; nos navires sont des gros navires de 300m avec plus de 174.000 m3 de GNL à bord, beaucoup plus gros que la maquette derrière moi : nous ne sommes plus au temps des chaudières mais sommes équipés de moteurs dernier cri qui peuvent aussi bien fonctionner au fuel qu’au gaz.
Aymeric AVISSE : Historiquement, ces navires fonctionnaient avec l’évaporation de la cargaison alimentant des chaudières, qui alimentaient à leur tour des turbines à vapeur.
Régis ADNET : Aujourd’hui nous sommes sur des système beaucoup plus efficients, dans la mesure où l’on peut choisir le type de carburant que l’on souhaite utiliser dans les moteurs. Ce système est couplé à un système de refroidissement de la cargaison qui n’était pas possible il y a encore 50 ans, ce qui réduit considérablement les pertes à quasiment rien.
Aymeric AVISSE : La propulsion est donc majoritairement fuel et occasionnellement gaz, ou on peut choisir ?
Régis ADNET : On peut choisir, c’est selon les besoins du moment et selon les besoins définis par l’affréteur qui possède la cargaison et qui va définir ce qu’il souhaite en faire.
Aymeric AVISSE : Concernant vos officiers, vous êtes sur un modèle sous pavillon français au registre international, ce registre autorise seulement le Commandant et son suppléant, êtes-vous à ce niveau ou au-delà de ce minimum ?
Régis ADNET : Chez Gazocéan, de manière historique, et nous continuons aujourd’hui, nous avons fait le choix délibéré de maintenir et développer un pool d’officiers compétents français. C’est ce que nous avons souhaité faire avec nos actionnaires et nous avons développé ce pool d’officiers français ces deux dernières années pour passer de soixante d’officiers à une centaine d’officiers, par recrutement externe et par la formation et la promotion interne.
Aymeric AVISSE : Vous embauchez donc à tous les niveaux mais majoritairement au niveau lieutenant/officier mécanicien ?
Régis ADNET : Exactement, dès la sortie de l’école notre volonté est de former les personnels officiers, nous recrutons des élèves en contrats pro et en stagiaires; pour 2022, c’est une cinquantaine d’élèves, ce qui est important compte tenu de notre flotte restreinte, mais nous avons eu également en 2022 vingt quatre recrutements et une dizaine de promotions ! Un plan similaire est prévu pour l’année 2023 avec même une augmentation du nombre d’élèves à bord de nos navires, avec une réelle volonté de développer cette flotte et de former son personnel.
Aymeric AVISSE : De le former, mais peut-être aussi de le fidéliser ?
Régis ADNET : De le former et de le fidéliser à travers des mesures fortes comme les rotations en 2 mois – 2 mois que nous essayons au maximum d’appliquer avec nos équipes ici à Marseille, qui travaillent beaucoup pour maintenir cet engagement de la compagnie. Et nous voulons pérenniser cet engagement en restant à l’écoute de nos personnels pour les maintenir chez nous. Un point également très important chez Gazocéan : c’est l’accompagnement des personnels qui nous rejoignent avec un réel engagement des personnels officiers et, à terre, une équipe pour suivre et accompagner ces personnes, et les former.
Aymeric AVISSE : 2 mois est une période d’embarquement plutôt intéressante voir inédite sur du transport de vrac : vous arrivez vraiment à les garantir ?
Régis ADNET : Dans la majeure partie des cas oui, et nous avons mis en place chez nous de mesures incitatives à travers une pénalité pour l’armement si nous n’arrivons pas à tenir les délais ! On n’est pas à 2 mois pile mais des mesures ont été validées de façon à ce que des efforts soient faits pour assurer cette rotation.
Aymeric AVISSE : Et quels que soient les ports ? Car contrairement au ferry ou à la croisière, les escales ne sont pas quotidiennes ?
Régis ADNET : Absolument, selon les ports et pour garantir la sécurité de notre personnel il ne va pas être possible d’effectuer des relèves mais ça demande une anticipation importante de notre service armement. Les navires que nous gérons assurent des rotations entre les USA et l’Europe, entre les USA et l’Asie, et des chargements essentiellement Asie pour Asie ou Asie pour Europe : sur ces chemins nous essayons d’organiser les relèves avec une forte anticipation au niveau des plannings mais également avec une relation étroite avec nos clients et la partie armateuriale, qui est une société avec laquelle nous travaillons étroitement, France LNG Shipping, qui assure la relation commerciale avec nos affréteurs ; nous sommes en relation permanente avec cette entité de façon à suivre l’évolution des navires et organiser au mieux les opérations et les relèves de personnels.
Aymeric AVISSE : Nous retiendrons donc des temps d’embarquement bien gérés ! Votre flotte est jeune mais doit encore accueillir deux nouvelles unités : vos besoins actuels découlent de cette nouvelle flotte mais peut-être aussi de départs ?
Régis ADNET : Les besoins effectivement conduits par la flotte qui s’est dévelopée, c’est un fait, et elle va encore se développer puisque deux nouveaux navires arriveront en 2025 du même type que ceux que nous opérons aujourd’hui : un de nos deux affréteurs a décidé de nous faire confiance et nous a confié deux navires supplémentaires. C’est un bon signe de confiance et d’espoir dans le développement de la société, mais en ce qui concerne le développement du pool de personnel, du recrutement et des promotions, il est également conduit par une évaporation naturelle avec quelques départs à la retraite.
Aymeric AVISSE : Justement quand on parle d’évaporation naturelle elle arrive à un certain moment dans la vie de l’officier qui a peut-être envie d’autre chose : lui permettez-vous d’évoluer vers le suivi de constructions neuves ou dans les bureaux afin d’élargir son champs via des postes à terre ?
Régis ADNET : Il existe des possibilités effectivement, Gazocéan c’est également une entité « Business development consulting & training » qui a pour charge de développer l’activité de Gazocéan sur certains domaines qui ne sont pas forcément la gestion de navires mais sur des projets (Gazocéan est impliqué dans une dizaine de projets chaque année), ça peut-être de la conversion, de la construction neuve, de l’assistance à projet pour des grands noms de l’Oil & Gas ou pour d’autres armateurs, et nous assurons également de la formation pour l’ENSM, formations dispensées par nos officiers car nous sommes les seuls à pouvoir les fournir en France, que ce soit pour les officiers Gazocéan comme pour nos concurrents.
Aymeric AVISSE : Vous avez même lié des partenariats avec les différents armateurs qui auraient besoin de cette compétence gaz pour venir leur proposer vos services :
Régis ADNET : il existe en effet des possibilités dans ce domaine mais il existe également des possibilités au siège dans nos locaux : à titre d’exemple nous avons aujourd’hui avec nous un second mécanicien qui est détaché à terre pour assurer les fonctions de Vessel Manager et gérer son navire et les relations avec les parties prenantes. Il existe donc des possibilités qui arrivent régulièrement et qui sont offertes en priorité au personnel embarqué GAZOCEAN.
Aymeric AVISSE : On entend énormément parler du gaz aujourd’hui qui devient un enjeu géopolitique, mais demain ce carburant sera certainement privilégié pour la propulsion des navires dans une première transition : vous attendez aujourd’hui deux nouveaux navires supplémentaires, quels sont les challenges à venir pour GAZOCEAN ?
Régis ADNET : Nous avons d’autres projets sur lesquels nous travaillons et direct avec le département Business Development, dont je vous parlais précédemment, ainsi qu’avec nos clients actionnaires qui sont GEOGAS et NYK (un des principaux armateurs au niveau mondial avec une grosse flotte transporteurs de GNL) : il travaillent activement sur les carburants de demain, et sommes en partenariat avec eux pour accompagner le développement de ces nouveaux carburants.
Aymeric AVISSE : GAZOCEAN s’inscrit donc dans l’avenir, dans la transition et l’accompagnement de la transition !
Regis ADNET : Absolument, d’ailleurs une de nos valeurs, qui a toujours été chez GAZOCEAN, c’est l’innovation et nous voulons rester sur cette valeur, c’est important pour nous.
Aymeric AVISSE : Dans cette optique vous recherchez aujourd’hui des collaborateurs pour un temps long pour toutes les fonctions possibles à bord comme en évolution à terre.
Régis ADNET : Oui, nous voulons attirer les talents chez nous et surtout conserver ces talents chez nous sur une longue durée : c’est une volonté affichée et partagée par nos actionnaires et nos clients.
Aymeric AVISSE : Merci beaucoup Régis, si vous souhaitez rejoindre les équipes de GAZOCEAN, n’hésitez pas à les contacter à armement@gazocean.com ou par téléphone au +33 (0) 4 91 07 68 68