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AEM 2025 – Puissance maritime : les lieux de pouvoir.

L’amiral VAUJOUR, chef d’état-major de la Marine nationale, puis Eric BANEL, directeur de la DGAMPA, ont tous les deux évoqué l’arraisonnement du Boracay au large de nos côtes pour saluer les capacités d’action en mer de l’État français. Rappelons que ce VLCC avait attiré l’attention des autorités en faisant des ronds dans l’eau au large du Danemark puis en Atlantique, qu’il avait refusé d’obtempérer aux ordres d’un navire de la Marine nationale et que ses documents ne permettaient pas de déterminer sa nationalité. Armé par une société écran installée aux Seychelles, apparemment sous pavillon du Bénin lors de l’opération, le Boracay avait changé trois fois de pavillon depuis 2024 et œuvrait très certainement pour la « flotte fantôme russe », pays dans lequel il avait chargé à destination de l’Inde. L’amiral VAUJOUR a indiqué que cette « flotte grise » exporterait actuellement 60% du pétrole russe et financerait ainsi 40% de l’effort de guerre.

Eric BANEL © Les Assises de l’Economie de la Mer DR

Tout comme Eric BANEL après lui, il a expliqué que la France était le seul pays à s’être doté d’une législation nationale et d’une organisation permettant de conduire à bien une telle opération. La coordination entre le préfet maritime, le procureur et le commandement de la marine est essentielle pour transmettre rapidement les informations puis les autorisations nécessaires afin de réaliser l’interception sans avoir laissé le temps au navire suspect de filer à l’anglaise. Il y avait une vraie fierté dans sa voix lorsqu’il a relaté cette démonstration de « vive force » en mer.

 

Démonstration de force, affirmation de puissance, les termes peuvent sembler excessifs pour qualifier une telle opération, même menée en dehors des eaux territoriales, mais elle offre un tel contraste avec la pusillanimité des gouvernements européens et avec l’impuissance qui semble frapper la politique française, qu’elle mérite d’être soulignée et analysée. Elle apparaît en effet comme le symbole de la dichotomie des expressions de l’Etat. D’un côté la presse se fait l’écho au quotidien des soubresauts d’une société civile déchirée et de ses représentants incapables d’unité et de vision, et de l’autre, nous découvrons qu’il y a des timoniers qui ne lâchent pas la barre. Ces timoniers sont les grands commis de l’Etat, à la tête d’administrations essentielles au fonctionnement du pays, et les patrons des entreprises phares, Naval Group et les armements en ce qui concerne notre branche. Les gouvernements sombrent, les élus boivent la tasse, mais le canard à deux têtes conserve encore l’une d’elles pour conduire ses pas.

Les politologues seraient tentés de parler ici d’une forme positive de l’Etat profond. Si ce dernier est souvent contesté pour la résistance au changement et la part sombre et discrète de pouvoir qu’il incarne, nous constatons que les grands serviteurs de l’Etat à la tête d’administrations ou d’entreprises essentielles sont la partie résiliente du pouvoir : passent les ministres, leur action s’inscrit dans la continuité. C’est sans doute une force de notre pays de ne pas sacrifier l’administration lors des changements de couleur gouvernementale (même si des ajustements s’opèrent dans la durée) comme aux États-Unis ou le maelstrom électoral emporte une grande partie des opérationnels du pays.

Rodolphe SAADE © Les Assises de l’Economie de la Mer DR

DGAMPA, le SGMer, mais aussi Naval Group permettent à l’action de l’Etat de s’exercer efficacement. Rodolphe SAADE, Édouard Louis-Dreyfus et bien d’autres armateurs et entrepreneurs mettent en œuvre une vision de long terme et ne sont pas contraints par des échéances électorales sauf quand celles-ci menacent de paralyser leur développement.

Aux Assises de l’Économie de la Mer, le contraste a été saisissant, compte-tenu du séquencement des interventions, entre les propos des deux grands armateurs, concis, précis et concrets, et l’intervention d’un Président embrassant dans de grandes envolées lyriques des succès diplomatiques de natures fort diverses sur la scène internationale (« avec l’UNOC, qui s’est tenue à Nice en juin dernier, la France a tenu son rôle de puissance maritime et de gardienne de l’esprit français universel ») et étourdissant son auditoire par ses affirmations, sans reculer devant une réécriture de certaines séquences de ses quinquennats (je pense ici à la politique nucléaire).

Nous avons retrouvé cette impression de flottement verbal lors du débat entre députés et sénateurs. Si certains possédaient très bien leurs sujets, d’autres ont quelque peu oublié qu’ils ne discouraient pas devant des électeurs mais devant des professionnels et des décideurs.

Les Assises de l’Économie de la Mer ont ceci de rassurant qu’elles rassemblent des entrepreneurs, des marins et des sédentaires qui travaillent avec foi à l’avenir du maritime et incarnent, comme l’a dit le président MACRON, « l’élan et la stratégie maritimes ».

Eric BLANC

© Les Assises de l’Economie de la Mer DR

 

 

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