Associations professionnelles, représentation gouvernementale, représentation des marins, syndicats professionnels des différentes branches industrielles ou exploitantes, tant d’entités qui vivent ensemble mais qui au fond oublient par moments de se parler. En France nous avons une entité, le Cluster Maritime Français, qui n’a pas oublié de lier toutes ces institutions en créant une synergie maritime. Au delà de la politique ou des intérêts particuliers, le Cluster est là pour dynamiser et globaliser la vision maritime aujourd’hui incarnée par Nathalie MERCIER-PERRIN que l’équipe de Jeune Marine est allée rencontrer à Paris, pour faire le point sur ses actions passées mais surtout sur ses ambitions et sur son programme dans un contexte très stimulant, avec d’immenses challenges et des enjeux particulièrement impactants pour l’avenir du maritime français.
Aymeric AVISSE : Bonjour Nathalie MERCIER-PERRIN, merci beaucoup de nous recevoir aujourd’hui à Paris, rue de Monceau, pour parler maritime ou plutôt France maritime et économie bleue. Alors avant de rentrer dans le cœur du sujet, nous aimerions en savoir plus sur vous, car vous êtes la toute nouvelle Présidente d’une institution qui est le Cluster maritime français (CMF). Vous succédez à Frédéric Moncany dans ses plus hautes fonctions, pouvez-vous nous présenter votre parcours ?
Nathalie MERCIER-PERRIN : Bonjour. Nathalie MERCIER-PERRIN, élue de depuis le 1er janvier Présidente du Cluster maritime français, après 23 ans de travaux chez Naval Group, de missions chez Naval Group. Naval Group c’est le fabricant français de navires militaires, sous-marins, bâtiments de surface, porte-avions, et dans cette organisation j’ai réalisé pas mal de missions, dont la création de Naviris qui est cette filiale entre les Italiens et les Français, Fincantieri et Naval Group, pour créer entre autres cinq projets de R&D : c’est un projet finalement européen.
Aymeric AVISSE : Donc une forte expertise dans le domaine plutôt typé militaire et aujourd’hui vous venez compléter avec le marine marchande et l’environnement général de la Marine nationale.
Nathalie MERCIER-PERRIN : Absolument. Donc, depuis le 1er janvier, j’ai étendu mon périmètre, c’est absolument vrai avec les armements civils et bien plus encore, que ça soit la pêche et d’autres parties prenantes, dont on va parler dans quelques minutes.
Aymeric AVISSE : Donc, on va le rappeler, vous êtes la présidente du Cluster maritime français : c’est une institution qui est relativement récente, qui a été créée en 2006 et qui compte aujourd’hui près de 500 membres, et se retrouve dans la quasi totalité des événements nationaux. Mais au fait, le Cluster maritime, c’est pour quoi faire ? Et en quoi et comment le Cluster vient-il complémenter les actions des agences gouvernementales ou des associations professionnelles comme Armateurs de France ?
Nathalie MERCIER-PERRIN : Le Cluster maritime français, tout d’abord, représente l’ensemble de l’activité économique du maritime : cette activité économique du maritime pèse en 2022 97 milliards de valeur de production, c’est à peu près 400.000 emplois et dans ces 400.000 emplois on va retrouver la représentation des syndicats professionnels, expérimentés et spécialisés dans différents domaines. On peut parler du Gican, on peut parler d’Armateurs de France on peut parler de SER (ndlr : Syndicat des Energies Renouvelables) qui s’occupe des énergies marines renouvelables donc le Cluster clusterise, je dirais centralise l’ensemble des parties prenantes et bien d’autres, je pense notamment à la pêche, aux ports et infrastructures portuaires mais pas que, la cybersécurité, on parlera de cela tout à l’heure. Mais on va avoir une infographie totale des acteurs de l’activité maritime, et c’est très important pour pouvoir négocier, discuter, entraîner la France vers le chemin de la compétitivité sur les années qui arrivent ; et on discute, on négocie, notamment avec les institutions françaises.
Aymeric AVISSE : Donc vous faites le lien entre les différentes branches maritimes, que ce soit la construction, l’exploitation, la production éolienne et tout cela, et puis vous allez peut-être porter la parole au niveau politique ?
Nathalie MERCIER-PERRIN : Oui, d’abord quelques chiffres clés : qu’est-ce que l’économie maritime ? Parce qu’on en parle depuis le début de cette interview, qu’est-ce qui compose l’économie maritime ? Je vais prendre quelques minutes quand même pour redonner ces grands domaines. D’abord, on a tout ce qui touche le port de commerce et les infrastructures portuaires, c’est, finalement, le début d’une aventure quand on arrive dans l’Hexagone ou dans les territoires ultramarins. Evidemment, on reçoit beaucoup de marchandises, on en parlera tout à l’heure, donc c’est, je dirais, quasiment le point zéro en fait. Ensuite, on a la partie industrie navale celle qui va fabriquer notamment, on parlait de Naval Group tout à l’heure, mais pas que, tous ces bateaux, avec une industrie qui se transforme actuellement d’ailleurs, en termes de transition éco-énergétique. Cette industrie, par exemple, représente un chiffre d’affaires de 13 milliards d’euros, dont 55 % à l’export ! Donc c’est quand même énorme. Tout à l’heure je parlais des ports de commerce : on a, au niveau national, 11 milliards de tonnes de marchandises qui ont transité en 2022, c’est énorme, c’est le flux mondial qui est énorme, et sur ces 11 milliards de tonnes de marchandises, sachez qu’en France on a à peu près 317 milliards de tonnes-kilomètre (ndlr : Une tonne-kilomètre (tkm) est une unité de mesure correspondant au transport d’une tonne de marchandises par un moyen de transport (route, rail, air, mer, voies navigables intérieures, gazoduc/oléoduc, etc.) sur une distance d’un kilomètre) qui ont transité en France donc c’est ce sont des gros flux et comme je disais, c’est le point zéro. Donc, l’industrie navale, les ports de commerce, on peut continuer avec la flotte de commerce qui, vous le savez, représente finalement le premier cordon ombilical important pour la France, puisque 90 % des marchandises dont je parlais tout à l’heure arrivent dans nos ports par ces bateaux. Donc il y a un vrai enjeu de souveraineté sur ces sujets-là, je voudrais parler aussi des énergies marines renouvelables avec, on en entend parler assez souvent, cet objectif de l’éolien en mer qui va venir compléter le bouquet énergétique français, avec des chiffres assez colossaux d’ici 2015, 2040 ou 2050.
Aymeric AVISSE : Parce que le Président de la République avait fait des annonces en 2017, ça s’est très vite accéléré, on a vu fleurir très rapidement sur Saint-Brieuc, sur Fécamp, même sur Marseille, beaucoup d’éoliennes en mer, sur différentes technologies, et tout cela il a fallu l’accompagner !
Nathalie MERCIER-PERRIN : Absolument, ce sont beaucoup d’entreprises ! On a enregistré un chiffre d’affaires de 2 milliards sur cette partie énergie marine, et on rappelle les objectifs de 20 GW de production d’éolien en mer qui devront être livrés entre 2030 et 40GW en 2050. Et si on parle juste de l’éolien en mer, c’est quand même 25 % du bouquet énergétique en 2040, c’est très significatif, et là de nouveau on parle d’économie maritime, d’économie bleue : vous voyez que ça a un impact énorme dans la vie des Français et des entreprises. Si on continue, on parle de la pêche évidemment : nos pêcheurs constituent aussi une pierre angulaire de notre souveraineté alimentaire, donc la pêche fait partie de cette économie bleue en France, sans parler de l’aquaculture, parce que l’aquaculture connaît un très fort développement: dans les prochaines années on mangera à peu près 55 % des poissons qui seront issus de cette aquaculture. Les entreprises françaises se développent énormément en France et à l’international sur ces sujets-là. Je voudrais aussi parler d’une autre question de souveraineté qui concerne l’économie maritime, qui est très forte, c’est les câbles sous-marins puisque vous savez que 98 % des communications, des flux bancaires, passent par les câbles sous-marins qui sont posés au fond des mers : c’est une souveraineté très importante pour la France et, évidemment, pour chacun des pays de cette planète.
Aymeric AVISSE : Avec des armements experts !
Nathalie MERCIER-PERRIN : Oui, avec des armements experts en France, je pense notamment à Orange Marine, à LDA sur la partie pose des câbles, on a des sociétés qui sont extrêmement performantes et qui sont des leaders au niveau mondial et je souhaite vraiment les saluer. Et puis, évidemment, aujourd’hui, on ne peut pas ne pas parler des grands fonds : la connaissance des grands fonds, 5 % des espèces des grands fonds sont connues aujourd’hui, il y a un énorme travail que cherchent à réaliser nos chercheurs français et mondiaux sur la connaissance du biotope, sur ce qu’on peut faire et ne pas faire sur ces grands fonds. Et je terminerai par un dernier sujet qui compose l’économie maritime bleue, qui est pour moi assez structurant, c’est la cybersécurité maritime, parce que aujourd’hui les guerres ne sont pas que physiques, elles sont numériques, que ça soit à titre personnel ou donc en B2B ou en B2C ; les attaques cyber sont violentes, elles mettent à terre évidemment des organisations et donc la
cybersécurité maritime pour nous est au cœur aussi de l’économie bleue. Voilà ce qui compose économie bleue, ça représentera, on dit depuis quelque temps que ça représentera un million de personnes dans les années 2030-2040, ça fait quand même une balance de plus 600.000 emplois qui vont arriver dans les prochaines années, ça devrait représenter 150 milliards de valeur de production et, dans tous ces sujets que j’ai évoqués, on a évidemment des nouveaux métiers connus, imaginés, mais ceux qui sont encore à découvrir dans les 20
prochaines années, notamment dans les drones, dans tous les biotechs, notamment le secteur de la santé ; on a on a tout un champ exploratoire qui est aujourd’hui proposé par la recherche qui va arriver dans les 20 ans, soit en R&D, soit en recherche fondamentale, auprès du grand public ou dans les entreprises.
Aymeric AVISSE : Donc une carte de compétence pour le Cluster très large, avec un spectre bien plus important que la marine marchande, puisqu’on arrive à avoir la navigation militaire, la construction, les énergies marines et la cybersécurité. Alors la présidence de Frédéric Montcany a été très maritime, nous connaissons tous son parcours, nous le connaissons tous en tant qu’ancien élève de l’ENSM, son bilan est très apprécié de ses pairs et vous arrivez aujourd’hui avec un challenge très important, c’est réussir à prendre la suite tout en apportant votre patte : est-ce que vous pouvez nous présenter les actions déjà réalisées et en cours et, peut-être, votre programme ?
Nathalie MERCIER-PERRIN : Tout d’abord, je voudrais saluer effectivement la création du Cluster maritime français qui a été une idée lancée en 2005 par Francis Vallat, et je voudrais vraiment saluer son audace parce qu’en 2005 il n’était pas facile de proposer au monde économique la création d’un cluster, et notre premier président fondateur a eu l’audace, et il a mené sa barque ; donc si je suis là aujourd’hui et si l’économie bleue est installée il ne faut pas oublier le début de l’histoire et donc saluer évidemment la création du Cluster. Frédéric a apporté une dimension incroyable, on le sait, une représentation et un cluster audible reconnu de tous et de toutes les parties prenantes, qu’elles soient des proches, des acteurs, que ce soit des agents économiques et politiques. Et on a besoin de ça pour faire passer nos priorités, nos sujets, pour être audibles ; Frédéric a été un président d’exception. D’ailleurs ces deux présidents, moi j’ai souhaité qu’ils soient toujours actifs, avec une autre forme d’action, mais au sein du Cluster maritime français, puisque les défis sont colossaux, avec des chiffres que j’ai dits tout à l’heure ; notre représentation au niveau national, européen et international est aussi très demandée, donc j’ai souhaité, j’ai proposé aux deux présidents d’être actifs à mes côtés pour dupliquer notre action en cas de besoin : et donc tous les deux ont accepté, et j’en suis ravie ! Pour moi, c’est vraiment important pour la pérennité du Cluster, on a une action sur des dizaines d’années et leur expérience est vraiment précieuse, évidemment. Alors sur ma partie à moi, l’acte 3, donc une femme qui arrive du monde de l’entreprise, une femme de projets, donc un autre parcours que celui de Francis et de Frédéric, j’ai très vite proposé lors de ma candidature plusieurs choses : d’abord, à la lecture des chiffres-clés que je vous ai dits tout à l’heure, je trouve qu’il est important que le grand public se saisisse de la question de l’économie maritime et comprenne, avec ses propres mots, quel impact cela a sur sa vie privée ; mais aussi sur la vie des entreprises, ça c’est évident.
Aymeric AVISSE : Mais je crois qu’il l’a un petit peu compris pendant le covid…
Nathalie MERCIER-PERRIN : Il l’a peut-être un peu compris pendant le covid, vous avez raison quand tes bateaux sont à quai et ne repartent pas, ou bloqués en mer, c’est quand même compliqué et d’ailleurs je veux vraiment saluer aussi nos marins et nos gens de mer qui, durant cette période-là et toujours pour d’autres motifs ou d’autres raisons, font le job, sont en mer, et dans des conditions pas toujours faciles, mais ça a été leur choix et je vais les saluer parce que ça les motive tous les jours, mais je pense qu’à terre on doit aussi avoir un temps de reconnaissance pour nos gens de mer. Donc une proposition qui est de faire en sorte que nos jeunes entre autres dans mon mandat s’intéressent et s’embarquent réellement dans le maritime ça veut dire qu’on va réenchanter, je souhaite réenchanter finalement une forme de communication sur le maritime pour que nos jeunes, qui sont je dirais au collège entre autres, on puisse les aider à préparer Parcours sup avec effectivement un peu plus de sérénité en, je dirais, prenant en compte aussi leurs désirs de vie ; ceux qui ont envie de faire des longues études, ceux qui n’ont pas envie de faire des longues études, ceux qui ont envie de défis techniques, ceux qui n’en ont pas envie, ceux qui veulent partir… Voilà donc sur cette partie réenchanter le maritime, j’ai dit assez souvent finalement nos jeunes, ou nous d’ailleurs, on sait beaucoup, on regarde beaucoup de films, des séries de science-fiction entre 20 mille lieues sous les mers, le chant du loup, Pirate des Caraïbes, le grand bleu, pourquoi pas oser…
Aymeric AVISSE : Cela reste une évasion et pas forcément un objectif de vie.
Nathalie MERCIER-PERRIN : Oui, et alors qu’en fait c’est ça peut être un objectif de vie ! Donc c’est juste décaler son regard et se dire que ce qu’on voit ou ce qu’on a aimé en série Netflix ou ailleurs et bien finalement on peut le vivre au quotidien, et ce n’est pas si compliqué. En fait voilà, donc ça c’est mon premier sujet, rendre le maritime accessible, audible pour tous, parce qu’on a besoin de nos jeunes pour rester compétitifs ; en fait je disais des grands chiffres tout à l’heure si on veut continuer à vivre aussi économiquement, si on veut que la France reste à une place de choix on a la possibilité effectivement d’avoir du travail et surtout de continuer à gagner des points de PIB notamment à l’export ; on a des métiers, des fonctions en mer et à terre avec des professions aussi très libérales, je pense notamment à des professions d’avocats, de juristes, mais très spécialisés dans le maritime qui vont faire venir gagner des points de compétitivité, comme des métiers je dirais très particuliers que ça soit l’écailleur, que ça soit le lamaneur, que ça soit je dirais le docker ; voilà, c’est un champ très large je peux parler évidemment des soudeurs et des ingénieurs ou des chercheurs mais il y a à peu près entre 900 et 1000 métiers en fait dans l’économie maritime, avec des passerelles possibles entre des métiers qui sont à terre réellement sur des industries terriennes ou sur des industries mériennes, en fait voilà ça c’est mon premier sujet. Le deuxième sujet qui m’intéresse toujours dans ce fil conducteur c’est la question des souverainetés et pas de la souveraineté, des souverainetés.
Aymeric AVISSE : Alors de quel ordre ?
Nathalie MERCIER-PERRIN : La souveraineté alimentaire, on en a parlé avec la pêche, on en a parlé avec l’aquaculture ; la question de la souveraineté énergétique, j’en ai parlé tout à l’heure avec l’éolien donc ça veut dire être à l’heure des rendez-vous pour que les Français vivent mieux ces transitions sociétales qui sont annoncées, et je dirais les questions de souveraineté technologique et industrielle, ça c’est aussi de l’emploi, ce sont aussi des parts de marché et ce sont des questions qui m’intéressent. On peut parler du bateau du futur, de la propulsion du futur, évidemment tout cela décarboné. On peut parler du recyclage de matériaux ou d’équipement des navires, des batteries, et je dirais « ne jetez pas vos batteries de téléphone », ça pourra nous servir un jour : il y a des terres rares dedans et des terres rares c’est rare et on va vouloir les récupérer. Donc, de nouveau pour nos jeunes ou nos moins jeunes, quand on veut travailler dans des projets « impact » il faut se retourner vers le maritime, le maritime en a besoin parce qu’il est incontournable aujourd’hui de l’économie française tout court.
Aymeric AVISSE : D’accord. Pour reprendre le premier sujet essayer de donner de la visibilité, essayer de donner envie aux gens d’engager une carrière maritime, on a entendu aux dernières Assises de l’économie de la mer le Président de la République qui a annoncé « l’Année de la mer » entre l’été 2024 et 2025 : ça va exactement dans votre sens, ça met à l’honneur la mer pendant une certaine période ; mais cette mise en lumière ne serait-ce pas un aveu de l’avoir abandonnée ?
Nathalie MERCIER-PERRIN : On ne peut pas dire ça, on dit simplement qu’en fait l’État souhaite mettre en lumière ce que je ce que j’ai repris d’eux, c’est-à-dire le poids de l’économie maritime tout court dans l’économie, donc le fait de faire un focus pendant un an, ça fait partie de l’outil de réenchanter le maritime parce qu’on en a besoin, comme j’ai cité tout à l’heure. Donc moi je le prends plutôt comme quelque chose de très positif où, pendant un an en particulier, et ça ne va pas s’arrêter après, mais pendant un an, comme on le fait parfois sur des périodes très courtes : on va accueillir les JO bientôt, on fait un zoom sur les JO et sur les sports, et là je trouve qu’entre les priorités d’emploi, les approvisionnements dont on a parlé, et je dirais les questions de souveraineté que j’ai aussi commentées tout à l’heure, il est important de montrer durant un an comment la mer, de l’assiette, je dirais à la consommation énergétique ou même au fait de récupérer son iPhone ou ses baskets à un moment donné dans un magasin, a drainé son quotidien, je pense que c’est très important. Mais ça ne s’arrêtera pas à la fin de l’année de la mer, non le cluster continuera avec les parties prenantes ! Mais j’espère que, après un an, les Français auront compris ce qu’apporte la mer en termes économiques et puis surtout en termes de projets personnels ou professionnels.
Aymeric AVISSE : Alors dans votre carnet de route vous aviez annoncé la ferme conviction que la France doit se doter d’une véritable politique d’éducation, de formation et d’attractivité de l’économie maritime, à la hauteur de ses atouts géopolitiques et industriels : c’est un très beau programme ! C’est effectivement une doléance de nombreux professionnels de la mer, depuis très longtemps. Vous siégez vous-même au CA de l’ENSM, qu’entend-on par « véritable politique d’éducation » ? Pouvez-vous nous présenter un peu cette vision puisque donc l’ENMM est devenue l’ENSM, on a déjà fait une modification. Que doit-on améliorer en plus ?
Nathalie MERCIER-PERRIN : D’abord je tiens à saluer l’action de son Directeur général et des membres du conseil d’administration de cette école, que je connais effectivement très bien, qui a opéré une vraie transition là aussi depuis quelques années et je sais que le travail n’est pas terminé et je laisserai François Lambert le commenter parce que c’est à lui que ce point revient. Moi je voudrais plutôt axer, ce que je disais tout à l’heure, la priorité sur les très jeunes. Pourquoi sur les très jeunes ? Et surtout finalement avec une lecture de la remise en perspective de ce que peut apporter l’apprentissage.
Aymeric AVISSE : Quand on parle très jeunes, c’est plutôt collège ?
Nathalie MERCIER-PERRIN : C’est collège, et donc un collégien aujourd’hui il arrive effectivement avec des codes d’éducation et sociaux très particuliers au collège, et très vite on va lui demander de prendre une décision sur son orientation et c’est rare d’avoir 100 % d’une classe confirmant leurs vœux en général ; moi je souhaite, en tout cas je demande de faire en sorte de travailler avec les parties prenantes des institutions françaises en charge de ce que je vais vous dire, mais je pense qu’il est très important d’avoir dans nos cours, dès la 6e, une information beaucoup plus détaillée que ce qu’on a aujourd’hui sur l’économie maritime. Enfin il est très compliqué vous l’avez très bien dit et au collège c’est pire d’expliquer ce que c’est que l’économie maritime. Si on demande à un jeune « qu’est-ce que l’économie maritime ? », pas sûr qu’un seul des grands thèmes que je vous ai cités, il l’annonce comme ça ; pour lui, la mer c’est les bateaux, c’est peut-être les vacances, l’été, la voile, c’est très bien mais quels sont les métiers derrière ? Quelle trajectoire peut-il suivre ? Comment on l’aide à comprendre tout cela ? Donc moi je fais partie des gens qui sont persuadés que plus tôt on les embarque dans une réflexion autour du maritime avec des métiers à terre ou en mer, mieux c’est ! Et avec un premier objectif avant de parler de l’ENSM, c’est Parcours sup, et Parcours sup ça ne peut pas se jouer je dirais un an avant de réaliser ses choix, ça peut être des choix par défaut…
Aymeric AVISSE : C’est tout un cheminement intellectuel qu’il faut avoir depuis de longues années.
Nathalie MERCIER-PERRIN : Je souhaite, en tout cas dans les manuels scolaires à la hauteur des chiffres que je vous ai dits, que les collégiens prennent conscience déjà du poids de l’économie maritime et de trouver naturellement un chemin possible pour eux, qu’ils aient envie ou pas de faire des grandes études ou de s’installer très vite en apprentissage, et je pense que l’apprentissage est une des clés aujourd’hui pour obtenir les salariés dont je parlais tout à l’heure : il nous manque à peu près 600.000 personnes ! On peut avoir cette main d’œuvre assez facilement par l’apprentissage, ça permet de se mettre de toute façon également en situation et puis finalement d’apprendre et puis de trouver aussi, pour ceux qui le souhaitent ou qui attendent un chemin de vie, que ce soit personnel ou professionnel, donc je trouve que l’apprentissage est une vraie voie à réenchanter aussi, en tout cas, sur les sujets du maritime.
Aymeric AVISSE : Il y a quelques dizaines d’années on avait une orientation vers la 4e, c’est-à-dire aux alentours des 14 ans ; aujourd’hui, vous avez des jeunes dont vous m’avez déjà parlé qui ont une appétence pour le maritime qui voudraient embarquer, je ne suis pas sûr qu’ils en aient le droit : doit-on réformer un petit peu tout ça ? Doit-on peut-être reprendre une filière maritime dès 14 ans, dès la 4e ?
Nathalie MERCIER-PERRIN : Vous posez évidemment de très bonnes questions et comme je suis une femme d’entreprise et que je suis une femme de projets, puisque je disais tout à l’heure partir d’une page blanche et arriver à installer trois, quatre, cinq projets, ce n’est pas aisé. Le Cluster maritime français, l’année dernière, a créé notamment un GS qui s’appelle « Emploi Attractivité », et à mon arrivée en 2024 (GS, c’est un groupe de synergie, un petit groupe de travail, avec des adhérents ou des parties prenantes externes du Cluster, pour réfléchir sur une question) ; on a quelques groupes synergie au Cluster, il y en a sur la décarbonation, il y en a sur les grands fonds, et donc il y a un groupe qui parle d’emplois et compétences et en début d’année 2024 j’ai fait rajouter « Formation », et ce GS en particulier touche la question Hexagone et Ultramarin, parce qu’on n’a pas beaucoup parlé de nos amis ultramarins ; ils sont complètement dans le dispositif que j’ai évoqué depuis le début de notre conversation et donc, dans ce GS « Compétence, Formation et Attractivité » nous allons reprendre et nous faisons la cartographie « quels métiers, quelles compétences, sur quels territoires, nous faut-il d’ici 2030 2040 ? à l’aune des chiffres que je vous ai dits tout à l’heure ; et là effectivement on adresse ou on pose la question de la réglementation entre autres ; donc et évidemment dès qu’on va trouver une question de réglementation ou clé on va regarder ce que ça veut dire, comment faire bouger les lignes et à ce moment-là je sais que le chemin sera long mais on fera bouger les lignes pour effectivement faire en sorte que les jeunes soient mis en situation d’une manière progressive, ayant finalement pour conséquence qu’à 18 ou 19 ans à la fin de l’apprentissage quasiment au moment où on rentre dans la vie active et qu’on est majeur le rythme de travail on le connaît, on ne le découvre pas dans sa globalité et dans sa totalité le premier jour de ses 18 ans parce que l’apprentissage est terminé ; j’ai effectivement entendu dans certains métiers du maritime, mais peut-être que ça touche d’autres branches que le maritime, où effectivement les jeunes entre 17 et 18 sont sur un rythme de travail avant la fin d’apprentissage qui n’est pas le même qu’après la fin d’apprentissage et quelques mois après effectivement ils ne comprennent plus et se découragent. Donc je pense que ça c’est un petit peu comme d’autres sujets de la vie personnelle, il faut apprendre à nos enfants, en fonction de l’âge, à intégrer des conditions ou des responsabilités qui sont différentes, parce que ça s’appelle la maturité et la « préparation à », donc je sais qu’il y a un petit travail effectivement de réglementation.
Aymeric AVISSE : …de réglementation et peut-être aussi de régionalisation parce que, effectivement, vous parliez des territoires ultramarins, les besoins n’y sont pas du tout les mêmes, avec des navires parfois beaucoup plus polyvalents mais plus petits, avec des brevets, des certifications différents, donc un beau chemin à parcourir…
Nathalie MERCIER-PERRIN : Un beau chemin alors, pour peut-être clôturer sur cette question ; je souhaite vraiment saluer les initiatives comme les lycées maritimes : évidemment qu’ils font un travail de qualité, il faut continuer ! Le Cluster maritime français, son conseil d’administration souhaite plutôt avoir une cartographie de tout ce qui existe, pour vérifier s’il ne manque pas certaines interfaces ou certaines chaînes, certains maillons de cette chaîne, et donc l’idée c’est de fédérer, de mettre en lumière et de travailler sur ce qui ne va plus ou sur ce qui manque en fait.
Aymeric AVISSE : Très bien, alors on parle de fédérer : le Cluster maritime est aussi là pour porter la parole de la France maritime et donc fédérer ses membres autour des sujets qui les rassemblent, en mettant le cap sur une croissance bleue, durable et responsable. Pouvez-vous nous présenter ces projets à venir et les challenges qui sont désormais les vôtres, et surtout avez-vous des priorités personnelles dans la hiérarchisation de ces problématiques ?
Nathalie MERCIER-PERRIN : Ma priorité personnelle, je vous l’ai dit, on l’a bien développée, c’est être à l’heure des rendez-vous 2030, 2040. Donc le Cluster maritime français, sous ma présidence, est en train de travailler sur un plan stratégique, une vision à 10 ans dont la finalité est d’être au rendez-vous de l’économie maritime tout court, en intégrant évidemment certains paramètres. Donc on a parlé de l’enjeu énergétique, on a parlé de la question de la décarbonation…
Aymeric AVISSE : La décarbonation, on a 2030 et 2050 en échéances.
Nathalie MERCIER-PERRIN : Absolument, donc accompagner toute la filière, toutes les filières à réaliser ces transitions, que ça soit industrielles, que ça soit au niveau du port, au niveau de l’usine, au niveau du bateau. Donc mon objectif, c’est effectivement d’accompagner ces grandes décisions sociétales qui ont été prises, qui sont aujourd’hui au cœur des mandats politiques aussi, mais en tout cas qui sont demandés par la société dans son ensemble, et donc c’est d’opérer ces transitions ; et j’ai trouvé que c’était intéressant de reprendre un peu le modèle de l’entreprise, c’est-à-dire d’avoir un cap sur 10 ans, avec des jalons et donc d’installer à la fois cette vision et la réalisation de ces grands objectifs, c’est-à-dire tout ce qui touche la décarbonation des mobilités de toutes façons, et des sites industriels : je dirais, se poser la question, parce que c’est un peu concomitant, et je pense qu’on aura évolué dans les 4 – 5 ans qui arrivent, c’est la question de l’hinterland, puisque finalement j’ai parlé du port au tout début de mon interview, en disant le port c’est le point zéro et en fait le point final c’est quand même le dernier kilomètre du consommateur. Et qu’est-ce qui s’est passé entre un port…
Aymeric AVISSE : Dernier kilomètre et puis également arriver à interconnecter complètement ! On a quand même le port de Sète qui est un très bel exemple, Cherbourg commence à prendre le pas…
Nathalie MERCIER-PERRIN : Strasbourg aussi va le faire et également Haropa, évidemment. Donc, la question si on veut vraiment décarboner la France, et je ne parle que sur la partie transport maritime, là c’est une vision vraiment nationale : il faut travailler tout le schéma, avec le fluvial et puis effectivement ensuite avec les derniers transports qui sont soit le ferroviaire ou le routier évidemment pour aller au plus près des consommateurs d’une manière décarbonée. Donc, là aussi le fluvial et le maritime, vous voyez, font partie de cette économie dont je parlais tout à l’heure, qui est complètement indissociable finalement de la vie des Français. Donc ça, dans les grands projets que vous me demandiez, il y a la question de la transition écologique, il y a la question je dirais plus largement des questions sur tout ce qui va toucher la sécurité ; donc, dans la sécurité, on va mettre la planification de l’espace du littoral, vous vous doutez bien qu’en 2040, enfin on se projette en 2040, on a de l’éolien, on a du transport maritime, on a de la pêche, il va y avoir des nouveaux métiers sur le pilotage, finalement sur la modélisation de l’usage de la bande côtière et ça veut dire qu’il va falloir aussi réglementer et sécuriser donc je pense que plus tôt on prend en compte cela, mieux on le vivra tous et on embarquera de nouveau la société vers cette trajectoire, sa compréhension et ces nouveaux métiers et puis, on parle de sécurité, vous savez bien que le monde n’est pas n’est pas je dirais aujourd’hui intègre des risques sécuritaires extrêmement importants et ça passe aussi par tous les sujets de cyber. Donc quand je parle de planification, on va intégrer aussi le numérique, beaucoup de numérique dans les années qui vont venir. Il y a un autre sujet dans la préoccupation aussi, notamment de ces transitions, c’est – les industriels sont en train de le faire depuis pas mal d’années mais on va continuer – c’est l’aide à l’opérateur, l’aide à l’ouvrier, c’est-à-dire l’arrivée des cobots, des robots.
Aymeric AVISSE : Ah oui, vous parlez des exosquelettes ou ce genre d’appareil ?
Nathalie MERCIER-PERRIN : Il y a de la pénibilité au travail, vous savez qu’on est dans une société où on veut faire attention à nos hommes et à nos femmes, et à nos moyens, et depuis quelques années les ouvriers peuvent être assistés à leur demande d’un certain nombre d’outils, ce qu’on appelle les exosquelettes, ou les cobots, et là aussi ça fait partie des transitions sociétales attendues de manière raisonnée, raisonnable. Je terminerai par un point finalement un peu générique qu’est-ce qui m’intéresse sur les dix ans qui arrivent, ce sont des projets à impact positif et industriel.
Aymeric AVISSE : Alors qu’est-ce qu’on impacte ?
Nathalie MERCIER-PERRIN : Exemple, la propulsion, les propulsions propres sont des projets à impact positif sur l’économie tout court et sur l’économie maritime, et on se rend compte que dans les transitions que je vous ai évoquées depuis le début de notre interview, quand je vous ai parlé des terres rares tout à l’heure, ce sont des projets impact, recycler est une filière à impact.
Aymeric AVISSE : En fait, quand vous parlez d’impact, il faut que cet impact soit relativement rapide ?
Nathalie MERCIER-PERRIN : Oui alors il y a toujours de la R&D, il peut y avoir une R&D beaucoup plus courte ; le recyclage c’est peut-être plus court que créer une nouvelle propulsion pour un énorme bateau. Donc, dans les projets impact on a des choses qui sont extrêmement rapides à mettre en place et puis il y a des choses qui prennent plus de temps et en fait peut-être qu’ un des secrets c’est d’intégrer dans cette feuille de route du temps court et du temps long et des projets impact qui ont un résultat immédiat et d’autres où le résultat sera un petit peu plus long.
Aymeric AVISSE : Parce que dans la décarbonation on va avoir le slow steaming, c’est un impact immédiat mais par exemple l’élaboration de carburant de synthèse ça sera un petit peu plus long.
Nathalie MERCIER-PERRIN : Absolument, mais vous voyez, finalement, ça nous permet, sur chacun des thèmes de transition à opérer, de dire comment j’occupe l’espace, voilà comment j’occupe l’espace temps, pour pouvoir commencer à me dire « je suis sur le chemin » ; on ne peut pas faire du On Off, comment je m’installe graduellement sur le chemin pour arriver effectivement en 2050, voire un peu plus, à une décarbonation totale par exemple : donc il
y a effectivement un panel d’outils et de solutions. On peut commencer par réduire sa vitesse par exemple, voilà, ça c’est projet impact immédiat, et puis on sait qu’on ne peut pas faire que ça, donc on va chercher des technologies ou, je dirais des approches, calculer sa route différemment, par exemple, ça c’est un projet impact. Donc, le maritime actuellement a beaucoup de projets impact dont on parle peu ou en tout cas on n’en parle pas avec ce vocabulaire-là. Donc merci d’y prêter l’oreille quelques minutes et c’est ce qui va nous mener aussi vers probablement ce chemin dont je parlais tout à l’heure, visible et audible par nos jeunes, qui eux ont envie aussi d’avoir une société plus propre, plus vertueuse : voilà, donc ça ça me semble aussi important de le dire.
Aymeric AVISSE : Alors ce qui est intéressant aussi avec le Cluster, c’est d’avoir une vision plus globale : là on parle de slow steaming ; le slow steaming, si on ne change pas notre chaîne d’approvisionnement et de stockage, ça veut dire qu’on augmente le nombre de bateaux ; si on les fait aller moins vite mais qu’on en met plus, le bilan ne sera pas forcément positif : donc peut-être avoir une vision un peu plus globale sur un changement de comportement général ?
Nathalie MERCIER-PERRIN : Oui alors entre deux, vous avez aussi l’arrivée quand même de bateaux avec plus de conteneurs aussi. Une partie de l’innovation aujourd’hui, notamment dans les ports, c’est l’arrivée de moyens assez colossaux qui vont effectivement charger et décharger ces porte-conteneurs qui sont assez hors normes quand même, on peut le dire, parce que 24.000 boîtes ça fait 350 km de trains de marchandises sur un bateau ; ça permet de dire, même si on travaille sur la R&D, même si on veut avoir une empreinte carbone à zéro sur ces bateaux, il faut quand même se rendre compte que à la tonne transportée c’est quand même pas mal ! Voilà, c’est effectivement, je dirais, à notre société, aux jeunes et aux moins jeunes, de se dire et de se poser la question « comment je vois mon transport maritime dans quelques années ? Comment je vois ces grandes questions de réinternaliser ou pas un certain nombre de choses sur le territoire français ? », mais on ne pourra pas tout faire, on ne peut pas changer de modèle en 5 ans ou en dix ans, il faut du temps et encore faut-il pouvoir le faire, ce qui posera d’autres questions : a-t-on les moyens de le faire ? A-t-on les moyens de produire ou d’avoir les matériaux les plus précieux pour pouvoir se dégager de toutes ces souverainetés dont on parle ?
Aymeric AVISSE : Et ne pas oublier qu’utiliser le maritime, c’est déjà faire un pas vers la décarbonation.
Nathalie MERCIER-PERRIN : Complètement, c’est, de loin, le mode le moins polluant, je le redis, c’est le meilleur compromis aujourd’hui en transport tout court.
Aymeric AVISSE : Alors le Cluster maritime fait un petit point annuel aux Assises de l’économie de la mer, on se donne rendez-vous au mois de novembre, les 19 et 20 novembre prochain, à Bordeaux. Souhaitez-vous assurer une continuité ou avez-vous déjà des surprises à nous annoncer ?
Nathalie MERCIER-PERRIN : Non, c’est un événement d’exception qui est attendu par toute la communauté, qui marche vraiment très bien, donc non on ne va pas changer une formule qui gagne. J’espère y voir plus de jeunes, ça c’est sûr mais non, pas de scoop, on vous attend à Bordeaux évidemment, ça sera un temps fort, comme chaque année. J’ai beaucoup parlé de transition, de temps long, de temps court, de sujets qui sont impactants pour notre société, on les retrouvera évidemment aux Assises, mais je laisserai surtout le groupe Ouest France vous faire les annonces. Voilà du programme et des intervenants.
Aymeric AVISSE : Très bien, on a hâte de découvrir tout cela, merci beaucoup de nous avoir reçus aujourd’hui rue Monceau, et à très bientôt.