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Situation sécuritaire en mer Rouge et au Moyen-Orient

Note de position

 

MENACES CONTRE LE SECTEUR MARITIME :

Le conflit entre Israël et le Hamas a entraîné une montée des tensions et une dégradation de l’environnement stratégique dans l’ensemble de la région. Dans ce contexte sécuritaire dégradé, les navires de commerce sont la cible privilégiée d’attaques dont le nombre et la diversité se sont largement accrus dans le sud de la mer Rouge depuis mi-novembre 2023, avec des modes d’action variés :

  • Arraisonnement de navires de commerce et enlèvements des membres d’équipage : plusieurs arraisonnements et tentatives d’arraisonnement ont été conduites, essentiellement par les houthis, dans le sud de la mer Rouge et le golfe d’Aden 3 . Les modes opératoires et l’équipement « professionnels » des assaillants (notamment avec hélicoptères) rendent difficile
    pour un navire de commerce de prévenir ou résister à de telles agressions.
  • Attaques de drones/missiles : de nombreuses attaques de drones aériens de fabrication artisanale ont été recensées depuis plus d’un an dans la région et tout particulièrement fin 2023-début 2024. Les capacités des attaquants se sont considérablement renforcées et l’emploi probable de plateformes flottantes/navires pour le guidage final ou pour augmen-
    ter la portée des drones a étendu largement la zone de risque. Les navires frappés avaient initialement un facteur de rattachement à Israël (notamment propriété, affrètement, investissement). Une croissance continue des tensions dans la région fait craindre un
    ciblage élargi des navires sous intérêt américain, britannique ou occidentaux, notamment ceux se dirigeant ou en provenance d’Israël.
  • Recrudescence de la piraterie : à ces menaces s’ajoute depuis quelques mois la recrudescence des actes de piraterie au large de la Somalie. Ces actes avaient quasiment disparu depuis 2017 et pour la première fois un navire a été arraisonné et son équipage enlevé en fin d’année 2023 4 . Plusieurs attaques de pirates ont également été déjouées. Cette situation requiert aussi la plus grande vigilance des compagnies maritimes.
    La situation sécuritaire évolue très rapidement et oblige les armateurs à une réévaluation permanente de ces menaces en ce qui concerne leur nature, leur portée, les modus operandi et les conditions de ciblage des navires.

IMPACTS ET MESURES MISES EN ŒUVRE PAR LES ARMATEURS :

DES IMPACTS HUMAINS, ORGANISATIONNELS ET ÉCONOMIQUES

Ces menaces sont génératrices d’inquiétudes légitimes de la part des gens de mer, susceptibles de les amener à avoir recours à leur droit de retrait. Elle conduit également les armateurs à s’adapter et mettre en place des procédures spécifiques pour garantir la sûreté des équipages et des navires, notamment :

  • Une veille approfondie sur les menaces et une réévaluation des analyses de risques.
    • L’implémentation des recommandations communiquées par l’industrie et les marines alliées (qui portent notamment sur les conditions de transit dans la région et le routing des navires, la chaîne d’alerte en cas d’attaque et les mesures préventives à mettre en
    œuvre contre les différentes menaces identifiées).
  • Pour certains armateurs, la suspension des opérations en mer Rouge 5 (avec soit un déroutement des navires par le Cap de Bonne Espérance, soit l’arrêt des navires
    avant ou après la mer Rouge dans l’attente de garanties suffisante en matière de sûreté).
    La situation sécuritaire dégradée au Moyen-Orient a également des impacts économiques :
  • Une réorganisation des trafics : l’immobilisation des navires ou le contournement par le Cap de Bonne Espérance entrainent l’allongement de la durée des voyages et induisent d’une part des coûts opérationnels pour les armateurs (carburants et hausse du coût de l’affrètement) et d’autre part une hausse mécanique des taux de fret dans certains secteurs doublement des tarifs slot sur le secteur de la ligne régulière par exemple). Face à cette situation et en réponse aux tensions sur les capacités, les armateurs peuvent également avoir recours à l’affrètement de nouveaux navires.
  • Une hausse des primes d’assurance importante (pour les navires qui continuent de transiter en Mer Rouge, jusqu’à 0,5 % du prix du navire).

ACTIONS DES ORGANISATIONS REPRÉSENTATIVES DE L’INDUSTRIE

Les organisations internationales et européenne représentatives 6 du shipping, avec qui se tient en lien Armateurs de France, se sont saisies de la problématique que représente la dégradation de la situation sécuritaire au Moyen-Orient. Elles ont diffusé des orientations à l’usage des armateurs :

  • pour le golfe Persique (09/11/23) et
  • pour le sud de la mer Rouge/golfe d’Aden (mises à jour le 15/12/23).

Armateurs de France, qui a relayé ces orientations et celles des forces maritimes combinées (CMF), a également appelé à une action coordonnée pour la protection des équipages et des navires de commerce le 17/12/2023 et sollicité l’appui de la Marine nationale en matière de protection des navires, de partage d’information sécuritaire et de recommandations opérationnelles.

La France a ainsi repositionné la frégate Languedoc en mer Rouge fin 2023, puis déployé la frégate Alsace début 2024, en protection des navires de commerce en réalisant des accompagnements. Le MICA Center7, sollicité par Armateurs de France, a également com-
muniqué des évaluations sécuritaires et des orientations particularisées en coopération avec ALINDIEN aux armateurs engagés dans la coopération navale volontaire (CNV) avec la Marine nationale.

La multiplication des informations (sources ouvertes, sociétés privées), peut faire craindre la diffusion d’informations non-fiabilisées et induire en erreur les opérateurs dans leurs analyses de risques. Armateurs de France informe régulièrement ses adhérents et leur recommande de s’appuyer prioritairement sur des informations vérifiées et fiabilisées par des sources étatiques et militaires. L’organisation se tient en lien avec l’ensemble des parties prenantes, militaires et institutionnelles, compétentes pour relayer les préoccupations et les attentes de ses membres.

POSITION D’ARMATEURS DE FRANCE :

Armateurs de France coopère étroitement avec la Marine nationale ainsi que les autorités françaises, pour continuer de tenir informées les compagnies sur la situation sécuritaire au Moyen-Orient, leurs diffuser les recommandations pour renforcer la sûreté de la navigation et
pour adapter leurs opérations. L’organisation porte également les principales attentes des armateurs français :

  • La sécurité des marins ainsi que la liberté de la navigation et du commerce maritime doivent être garantis par les États riverains, et l’ensemble de la communauté internationale, en particulier l’Union européenne.
  • Le renforcement de la présence navale dans la région, ainsi que les actions conduites en protection de navires de commerce pour garantir la liberté de la navigation, par la Marine nationale et les marines alliées sont saluées par les armateurs français. L’aggravation des menaces place en effet les navires de commerce dans des situations de vulnérabilité accrue. Les drones sont une menace bien différente de celle que représente la piraterie, et les moyens de protection face à ces nouvelles menaces en sont d’autant plus limités. Cette réponse doit s’inscrire dans le respect du droit international et prévenir tout risque d’escalade des tensions dans la région.
  • Une coordination approfondie des moyens navals déployés est également nécessaire pour offrir la meilleure protection au shipping. Les armateurs saluent le lancement de l’opération Prosperity Guardian fin 2023 et soutiennent le lancement d’une opération au niveau européen début 2024 pour renforcer la position de l’Europe et de ses alliés et assurer la sauvegarde de nos intérêts stratégiques. Armateurs de France et ses partenaires internationaux portent ce message auprès des institutions de l’UE. Il est essentiel que ces opérations s’appuient sur les systèmes d’alerte et de partage d’information sécuritaire existants, en particulier le MSCHOA 8 de l’UE. Il est également essentiel que les accompagnements réalisés sous mandat national ou dans le cadre d’une opération européenne bénéficient prioritairement aux armateurs français et européens.
  • Un partage d’informations approfondi sur les zones d’activités des moyens de la Marine nationale déployés dans la région, pour soutenir l’effort de réassurance déjà engagé par celle-ci en protection du shipping. La Marine s’est engagée en 2022 sur une telle initiative
    dans le golfe de Guinée qui satisfait les compagnies maritimes françaises. Un partage analogue est sollicité au Moyen-Orient.
  • Les compagnies nécessitent des informations sécuritaires ainsi que des recommandations fiables et actualisées sur les menaces (notamment, en ce qui concerne les drones, sur les capacités techniques de ceux-ci : ciblage, portée, etc.). Les orientations publiées (MICA Center, industrie maritime, notamment les Best Management Practices) sont mises à jour en tenant compte de l’évolution de la menace. Des clarifications concernant les conditions de mise en citadelle de l’équipage en cas de tentative d’arraisonnement, de coupure de l’AIS 9 et la doctrine d’emploi des gardes armés devraient également être proposées aux armateurs.

 

1- Sont pris en compte dans ce calcul l’ensemble des navires exploités par des compagnies françaises, navires contrôlés, incluant à titre non exclusif
les navires battant pavillon français. Les navires de pêche ou ne réalisant pas d’activités dîtes de navigation de commerce ne sont pas comptabilisés.
Il est possible, pour considérer plus largement des navires rattachés à des intérêts français, d’ajouter à ce calcul plusieurs dizaines de navires exploités par des armateurs étrangers mais dont le donneur d’ordre est français.

2- Au 16 janvier 2024, on recense 28 attaques contre des navires de commerce dans la région depuis début octobre 2023.

3- Arraisonné le 19/11/2023 le navire GALAXY LEADER est toujours détenu par les houthis.

4- Le vraquier RUEN a été détourné le 14/12/2023 au large de la Somalie.

5- L’ICS estime que 80 % du trafic conteneurisé transitant habituellement par la mer Rouge est dérouté par le Cap de Bonne Espérance. Le transport de gaz et de pétrole est également significativement impacté. Ce déroutement correspond à une durée supplémentaire de voyage de 6 à 14 jours en
fonction des lignes.

6- ICS, BIMCO, INTERCARGO, INTERTANKO, OCIMF, CLIA, IMCA, ECSA.

7- Le Maritime Information Cooperation & Awareness Center (MICA Center)
est le centre français d’analyse et d’évaluation de la situation de sûreté
maritime mondiale.

Source : CP AdF

 

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