Arrivé au Havre le 27 décembre 2018 en provenance d’Anvers pour sa dernière escale en Europe du Nord, l’APL Changi, aurait dû appareiller le lendemain après-midi, mais c’était sans conter sur la présence d’un brouillard persistant empêchant les remorqueurs de crocher et la visite inopinée du Port State Control.
Alors que les opérations commerciales étaient terminées, l’APL Changi qui attendait une amélioration des conditions de visibilité a été contrôlé par une équipe de trois inspecteurs des Affaires Maritimes. Un prélèvement effectué par le Port State Control a révélé un taux de soufre du fuel low sulfur à 0,16%, soit un dépassement de 0,06% de la norme SECA en Manche (SECA : Sulfur Emission Control Area).
Immédiatement la machine judiciaire s’est mise en route, avec saisie du navire sur réquisition du Procureur de la République, amende de 80 000€, enquête de la Gendarmerie Maritime etc. et cela en début de soirée le dernier vendredi de l’année à la veille du week-end rallongé de la Saint-Sylvestre. Le taux fixé par la réglementation est de 0,1%. Entre 0,11% et 0,15% le navire écope seulement d’une amende, à partir de 0,16% il y a engagement d’une procédure judiciaire envers l’armateur avec saisie du navire.
Lors de l’escale précédente à Anvers, le navire avait effectué des soutes en chargeant deux lots différents, l’un en High Sulfur à 2,7% et l’autre en Low Sulfur à 0,099%. Or ces deux lots transitent par le même circuit entre la bride de connexion et la répartition entre les réservoirs sur une longueur d’environ 70 mètres. Malgré le nettoyage de la ligne entre les deux lots, des résidus du premier ont probablement contaminé le second qui était déjà à la limite du taux réglementaire.
Propriété de CMA CGM, via sa filiale singapourienne APL, le navire a dû déhaler une première fois afin de dégager son poste pour un autre porte-conteneurs. Les services de CMA CGM, tant au Havre qu’à Marseille ont obtenu au bout de 24 heures de négociations, l’autorisation d’aller attendre la levée de la saisie au mouillage sur rade, à condition de rester dans les eaux territoriales françaises. L’APL Changi a ainsi mouillé en zone d’attente du Havre le samedi 29 décembre peu avant minuit.
Finalement, l’APL Changi a été autorisé à faire route vers Malte le lundi 31 décembre 2018 vers 17 heures. Trois jours d’immobilisation qui vont coûter bien plus cher à l’armateur que l’amende de 80 000€, avec à la clé une désorganisation temporaire impactant l’ensemble de la ligne FAL 3 (retards, réservation passage de Suez, etc.).
À un an de la mise en place de la réglementation Low Sulfur 2020, on peut s’attendre à une augmentation de ces inspections ciblées par les Ports State Control.