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La Marine Marchande mène à tout à condition d’en sortir…

Jacques Chirac à la barre du Club Med 1 en construction aux ACH du Havre ©Eric Houri
Jacques Chirac à la barre du Club Med 1 en construction aux ACH du Havre ©Eric Houri

 

Adolescent, je rêvais de faire carrière dans la Marine Marchande

Jacques Chirac.

À l’heure où la France rend hommage à Jacques Chirac, chacun y va de sa petite anecdote sur la personnalité de notre ancien Président de la République, qui aurait pu choisir un autre cap professionnel tout aussi aventureux, mais bien moins exposé aux turpitudes et aux joies de la vie politique française.

Ayant tout juste obtenu le baccalauréat, Jacques Chirac a embarqué comme Pilotin radio à bord du Capitaine-Saint-Martin, de l’UIM ( Union Industrielle et Maritime) pour un voyage sur les côtes d’Afrique. (Sa fiche au service du personnel navigant de l’UIM indique «pilotin radio» du 12-7-1950 au 3-8-1950). Il serait resté à bord deux mois et demi, ce qui correspond mieux au temps de voyage des cargos à cette époque-là.

 

Jacques Chirac Pilotin-Radio à bord du Capitaine Saint-Martin en juillet 1950 ©DR
Jacques Chirac Pilotin-Radio à bord du Capitaine Saint-Martin en juillet 1950 ©DR

 

Dans deux livres écrits dans les années 80, Jacques Chirac revient sur cette expérience maritime qui aurait pu changer sa trajectoire professionnelle.

« Baccalauréat. Mention « Assez bien », en poche, il peut s’il le désire intégrer l’École des sciences politiques sans subir l’examen d’entrée. Mais… dit-il, « A ce moment, j’ai eu envie de partir.« 

Chirac veut embarquer sur un bateau. Les relations de son père l’y aident, François Chirac, son père, est en rapport avec le président de l’union industrielle et maritime. Ce sera utile pour monter sur un bateau de la compagnie. « J’avais peu d’argent, je n’aimais pas en demander. Quand je partais, je partais…. » Il obtient une inscription au Havre – « J’y suis arrivé en auto-stop« , puis il se rend à Dunkerque où il s’installe sur un petit cargo de cinq mille tonnes, le Capitaine Saint-Martin. « J’ai été pris en faisant valoir mes relations« , admet Chirac. Travail difficile […] de se retrouver aux prises avec des marins. Il les copie beaucoup, les singe un peu : il fume la pipe jusqu’à en être malade ; à Alger, il partage leurs virées nocturnes. Le petit Parisien découvre une autre galaxie.

Plus important, il est confronté, pour de bon, au travail physique le plus pénible qui soit. Au retour, le Capitaine Saint-Martin charge à Melilla, dans le Rif espagnol, une cargaison de minerai de fer. « Une horreur, se souvient Chirac. La peau est rapidement incrustée par une poussière rouge. Il faut se frotter pendant des jours avant d’en être débarrassé. Psychologiquement, les hommes en étaient transformés. Ils devenaient hargneux. » Il n’aura pas l’occasion d’en connaître plus. Le jour du retour à Dunkerque, il distingue, de loin, la silhouette de son père. Le banquier est venu le chercher. Objectif : Sciences Po. « Je lui ai proposé de préparer le brevet de lieutenant au long cours pour faire carrière dans la marine marchande. Il l’a fort mal pris. » Une réaction sans surprise. »

Extrait de Chirac ou les passions du pouvoir, Maurice Szafran, Grasset, 1986.

 

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Jacques Chirac raconte : « Je suis parti avec mon petit baluchon. J’ai d’abord été à Rouen où je me suis engagé comme inscrit maritime, puis en auto-stop j’ai gagné Dunkerque. Et là j’ai réussi à me faire engager comme pilotin à bord d’un cargo de 5 000 tonnes, le Capitaine Saint-Martin qui cabotait avec du charbon dans les ports espagnols et le long de la côte africaine. »

En vérité, il faut dédramatiser un peu l’anecdote. Le petit baluchon avait été soigneusement préparé par Mme Chirac qui avait trop peur que son fils n’attrape froid sur les côtes africaines et M. Chirac père avait non seulement donné à son fils l’autorisation écrite indispensable pour s’engager comme inscrit maritime, mais encore l’adresse d’une de ses relations de l’Union industrielle et maritime, c’est-à-dire l’armateur du Capitaine Saint-Martin. Il s’agissait moins d’une rupture familiale que de très belles vacances qui dureront deux mois et demi et rapporteront 1 383 francs au jeune Chirac (sa feuille de paie en fait foi).

Chirac a gardé un souvenir de cet été 50. « Les marins de ce bateau, aime-t-il à raconter, m’ont emmené dans des endroits que la morale réprouve. C’était pour moi une expérience un peu étonnante, mais amusante. À Alger, j’ai eu droit au grand jeu. On est allé dans les fameux quartiers réservés de la Casbah et on y a passé la nuit entière. Quand, au petit matin, je suis redescendu vers le port, dans l’odeur de crésyl sur les trottoirs, d’anisette et de produits coloniaux, je n’étais plus le même. » (Entretien avec l’auteur.) Bref, alors que Giscard fait du tennis à Oxford, Chirac, lui, fréquente les bordels africains.

Et l’aventure va se terminer fin septembre comme toutes les grandes vacances. Chirac raconte, et cette fois semble-t-il sans enjoliver les choses : « Je faisais relâche au Havre où j’ai trouvé sur le quai mon père qui était beaucoup plus grand et beaucoup plus fort que moi, qui avait trouvé que l’expérience avait assez duré et qui m’a réintégré dans le berceau familial sans que j’aie eu la possibilité ou l’occasion de dire  » ouf « . Il avait un sens de l’autorité et les moyens de persuasion contre lesquels j’étais un peu jeune pour lutter, ce qui mit fin à mon expérience maritime. »

Et, en octobre 1950, après avoir visité les bordels africains, fait la démonstration de son indépendance (et appris à fumer la pipe), Jacques Chirac rentrait très sagement en Mathématiques supérieures au lycée Louis-le-Grand.

Extrait de Un inconnu nommé CHIRAC, Thierry Desjardins, La Table ronde, 1983.

À la lecture de ces deux extraits de livres, on ne sait pas s’il est resté réellement embarqué tout le voyage, s’il a débarqué à Dunkerque ou au Havre. Une chose est sûre, la carrière maritime envisagée par Jacques Chirac n’était pas du goût de Chirac père. La légende « MarMar » dit qu’il alla même jusqu’à Alger récupérer le fiston…Dommage, il aurait été très probablement un « Grand Mât » emblématique à l’Hydro !!

Jacques Chirac visitant les ACH du Havre avec Gilbert Fournier © Eric Houri 1989
Jacques Chirac visitant les ACH du Havre avec Gilbert Fournier © Eric Houri 1989

 

NB : Dans le même quotidien national, le voyage embarqué vers l’Afrique change de destination vers l’Amérique où il fait la plonge dans les restaurants et s’initie aux charmes de la Nouvelle-Orléans…En fait, c’était un voyage d’étudiant fin 1954 début 1955 pour sa thèse de géographie alors qu’il était à Sciences Po « La Nouvelle Orléans et son Port en 1954 »… Comme quoi, les légendes s’accommodent des publics différents…

 

Source
U.I.M Marine free.fr/ Le Figaro
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