Jeune Marine N°261Vie à bord

Axel GRILLOT : témoignage d’un parcours insolite

La voie de marin est parfois un hasard mais souvent une vocation qui naît dès le plus jeune âge. Nous avons rencontré Axel GRILLOT actuellement en formation à l’ENSM du Havre, au parcours passionné, qui nous partage sa vocation mais aussi son engagement militaire : eh oui ! C’est encore possible et très enrichissant :

 

Axel GRILLOT

Dès ma classe de 4ème au collège je souhaitais devenir pilote d’hélicoptère dans le monde militaire.

Dans le même temps que la préparation de mon bac S, j’effectue alors un stage de Préparation Militaire Marine au sein du centre de Dijon en 2014-2015. Ragaillardi par mon rang de major de la promotion, cette PMM m’a conforté dans l’idée que la Marine serait le contexte idéal pour devenir pilote d’hélicoptère, ou peut-être officier sur bâtiments de surface.

La Marine marchande fut également évoquée durant la PMM, ce que je ne devais pas oublier.

J’hésite encore à cette époque entre l’ALAT, la Marine et l’Armée de l’air.

Je rentre alors en Maths Sup au Lycée Naval de Brest. Bien que très convenablement classé et assuré de passer en Maths Spé, les longues heures de travail sur les cahiers et les livres auront raison de mon projet car le médecin m’annonce que je serai inapte pilote en raison du critère Y du SIGYCOP*.

Devant cet obstacle, je décide après deux mois d’hésitation entre les deux marines d’opter pour la Marine marchande et ses 5 ans et demi d’études, qui me permettait à terme de disposer peut-être d’un peu plus de temps personnel, et donc de piloter dans le civil.

Admis à l’ENSM, je n’avais pas quitté la Marine nationale pour toujours, ayant appris que mon parcours dans la Marine marchande m’offrait la possibilité de devenir officier de marine de réserve et d’embarquer comme adjoint ou chef de quart grâce aux spécificités de la PMS MARMAR

J’effectue donc tout naturellement une seconde préparation militaire, la PMS Marine marchande pendant ma 2ème année d’ENSM, soit un stage de deux semaines partagées entre la BAN de Hyères, la base navale de Toulon, le camp de la Légion étrangère de Carpiagne et le CROSS MED. Cette PMS fut très enrichissante en termes de connaissances sur la Marine nationale. Nous avons pu manœuvrer des remorqueurs dans la rade de Toulon, tirer au FAMAS au camp de la Légion et visiter notamment le PA Charles De Gaulle à bord duquel nous avons eu une visite globale avec des précisions sur la structure, le compartimentage et la sécurité incendie du bâtiment durant son Arrêt Technique Majeur – ATM.

C’est à cette occasion que l’ACORAM fut présentée à ma promotion par le CRC1(R) Gestat de Garambé et que cette association à laquelle j’adhère ensuite finit de me convaincre de ne pas abandonner La Royale au prétexte de marine marchande.

Un an plus tard, je signais mon premier ESR comme adjoint de quart navigation au sein du CROSS Jobourg au Nord-Ouest de Cherbourg, dans la Manche. Les Centres Régionaux Opérationnels de Surveillance et de Sauvetage sont des unités particulières relevant de l’administration des Affaires Maritimes – dépendant du ministère en charge de la Mer -, les Administrateurs et tout le personnel de quart étant du personnel de la Marine nationale, en majorité de la spécialité de guetteurs de la flotte.

Suite à l’obtention de mon diplôme d’élève-officier de première classe de la Marine marchande, je passe dans le corps des officiers de réserve en devenant aspirant(R) au 1er juin 2020, avec la spécialité C QUA.

Peu de temps après être devenu chef de quart navigation au sein du CROSS Jobourg, je pus signer un nouvel ESR de 3 ans. Mon rôle au sein du CROSS Jobourg est de surveiller le trafic maritime transitant dans la Search and Rescue Region (SRR), Zone de Recherche et Sauvetage définie dans la Convention de Hambourg de 1979. Nous assurons aussi la fonction de Service d’Assistance Maritime (MAS en anglais) et fournissons une assistance aux navires en avarie qui en font la demande, le CROSS assurant toujours a minima un suivi de la situation si aucune assistance n’est requise.

Nous avons également la responsabilité du trafic dans le Dispositif de Séparation de Trafic (DST) des Casquets et dans une zone autour dans laquelle nous assurons les fonctions dévolues au Service de Trafic Maritime : un service d’information à la navigation et un service d’assistance à la navigation en permanence, et enfin un service d’organisation du trafic lorsqu’un ORSEC de niveau 2 ou 3 est déclenché.

© Julien BOURBON DR

A ce titre nous assurons la diffusion des Renseignements de Sécurité Maritime (RSM) et effectuons des diffusions de sécurité lorsque le besoin s’en fait sentir.

La zone du CROSS Jobourg comprend plusieurs zones importantes comme le Raz Blanchard, qui présente l’un des courants de marée les plus puissants d’Europe pouvant atteindre 12 nœuds, mais aussi la baie de Seine, un abri naturel par vent d’Ouest et enfin les îles anglo-normandes d’Aurigny, Guernesey et Jersey avec leurs eaux territoriales. Toutes ces zones ainsi que la présence du port du Havre et de son trafic rendent la zone du CROSS Jobourg passionnante.

Cette expérience au CROSS Jobourg me permet de comprendre davantage le rôle des Services de Trafic Maritime (STM) côtiers et de visualiser et anticiper les interactions entre navires et STM.

Elle me permet en outre d’apporter une plus-value de connaissances sur la Marine Marchande, moins familière aux militaires de la Marine nationale. J’ai notamment pu apporter un éclairage à un lieutenant de vaisseau dans sa prise de décision sur une possible pollution par un chimiquier dans la Zone Économique Exclusive sous la responsabilité du CROSS Jobourg, en lui indiquant ce que le navire rejetait d’après les déclarations du commandant du navire.

Les connaissances acquises sur la Marine marchande me permettent également d’avoir une meilleure vision et anticipation sur la sévérité des avaries que peuvent déclarer les équipages des navires.

© Julien BOURBON DR
© Julien BOURBON DR

J’ai notamment participé à coordonner  l’opération de remorquage du navire ANTON (3/4 février 2021), en avarie dans les eaux territoriales françaises à l’ouest du Cotentin entre le Raz Blanchard et Guernesey, par l’ABEILLE LIBERTÉ jusqu’à Saint-Malo.

Bien que maintenant éloigné géographiquement de Marseille où j’ai fait mes études de marine marchande, mon attachement à la section Provence et Corse de l’ACORAM, qui a contribué à m’ouvrir les yeux sur les passerelles existant entre nos deux marines, est la raison du choix que j’ai fait de rester affilié à cette section méditerranéenne.

EV2(R) Axel GRILLOT

Membre de la section Provence et Corse de l’ACORAM

 

* Pour mémoire, le SIGYCOP est un profil médical permettant de déterminer l’aptitude d’un individu à exercer dans l’Armée française. La lettre Y correspond aux yeux et à la vision.

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