Connaissez-vous vraiment les armements français ?Jeune Marine N°264Vie à bord

La Compagnie Maritime Nantaise

Connaissez-vous vraiment les armements français ?

Nous voici aujourd’hui sur le port du Havre pour un nouveau volet de notre série « Connaissez-vous vraiment les armements français ? » et contrairement à notre emplacement actuel à Port 2000 ce n’est ni un armement au conteneur ni aux services portuaires malgré la fin du chantier des deux derniers postes à quai : nous allons vous refaire découvrir la Compagnie Maritime Nantaise.

La Maritime Nantaise exploite essentiellement des rouliers mais pas que ! Leurs navires sont très polyvalents et nous allons rencontrer le Commandant du MN TOUCAN, Etienne ROBIC, afin qu’il nous explique son parcours, son emploi et son évolution au sein de cet armement.

 

MN TOUCAN à Port 2000 © Aymeric AVISSE DR

 

Aymeric AVISSE : Bonjour Etienne, nous nous rencontrons aujourd’hui pour que tu nous expliques l’exploitation de vos navires de la Maritime Nantaise au sein du groupe SOGESTRAN, afin de comprendre en quoi consiste votre activité et comment il est redevenu un armement de premier ordre. Tu es entré à l’école en 2004 pour occuper actuellement le poste de Commandant sur le MN TOUCAN. Comme j’expliquais en introduction nous sommes actuellement à Port 2000, peux-tu nous expliquer pourquoi un roulier fait escale dans port à conteneurs ?

Etienne ROBIC : Nous venons à Port 2000 car le MN TOUCAN est un navire affrété par ARIANE ESPACE, pour le transport de la fusée ARIANE, et dans le cadre de cet affrètement nous chargeons des colis spéciaux généralement roulants qui iront dans le garage mais également des conteneurs standards de 20 et 40 pieds : c’est pour cela que nous sommes en ce moment à Port 2000 mais allons déhaler vers RoRo3 ce soir pour la partie roulante.

AA : Donc tu ne fais pas que du roulier, tu fais également du colis et du conteneur ?

ER : On fait un peu de colis en vrac, et du conteneur.

AA : Est-ce spécifique au MN TOUCAN ou les autres navires ont-ils d’autres spécificités ? Car, de mémoire, le MN PELICAN ne fait que de la remorque et vous avez d’autres navires au sein de votre compagnie ?

ER : Effectivement nous avons deux navires, le MN CALLAO et MN TANGARA, qui travaillent pour le ministère de la Défense pour le transport militaire vers les différentes bases françaises à travers le monde, où les chargements sont également différents, allant du simple conteneur au char LECLERC avec beaucoup de vrac, du roulant et du volant.

 

Exercise abandon à bord du MN TOUCAN © Aymeric AVISSE DR

AA : Nous ne sommes plus du tout sur des lignes régulières du coup ?

ER : Ça peut être au spot, mais avec une base de lignes régulières pour l’Armée avec une première desservant les Antilles, la Guyane et l’Afrique de l’Ouest, une seconde avec les bases de l’océan Indien comme la Réunion et Mayotte, et enfin une ligne tour du monde qui combine tous les ports déjà cités plus les îles du Pacifique comme Tahiti et Nouméa. De très beaux voyages ! Pour notre cas,  aujourd’hui nous faisons le tour des ports européens pour récupérer les morceaux de la fusée pour les acheminer à Kourou.

AA : Lorsque j’ai commencé à naviguer on appelait votre armement « La Morbihannaise », mais aujourd’hui en plus d’être nommé Maritime Nantaise, cet armement fait partie d’un groupe : SOGESTRAN. Peux-tu nous expliquer l’évolution de cet armement et ce qu’a apporté à votre armement le rapprochement dans le groupe SOGESTRAN ?

ER : Effectivement la Maritime Nantaise s’appelait précédemment « La Morbihannaise et Nantaise de navigation », ils travaillaient déjà avec ARIANE ESPACE, puisque le contrat remonte à ARIANE 4 ; elle opérait également les passages d’eaux pour les îles du Morbihan, et début des années 2000 elle est devenue la Compagnie Maritime Nantaise, appartenant à la Compagnie Nationale de Navigation. Assez récemment la Compagnie Maritime Nantaise a été rachetée par le groupe SOGESTRAN, ce qui a apporté beaucoup de choses à l’armement : pour nous, navigants, une plus grande stabilité avec une vision et avenir qui sont plus clairs et plus rassurants mais également une logistique qu’on  n’avait pas forcément avant, car tout en nous laissant une grande liberté dans nos habitudes et modes de travail nous faisons des comparaisons avec d’autres branches du groupe, ce qui nous permet d’évoluer. Quand j’évoque le gain côté logistique, il est surtout arrivé grâce au bureau d’études de SOGESTRAN qui nous a permis de travailler sur certains chantiers comme les scrubbers ou sur de nouveaux logiciels de chargement.

MN TOUCAN à quai au HAV5 © Aymeric AVISSE DR

AA : Tu as uniquement navigué pour des armements à taille humaine, tu as réalisé l’essentiel de ta navigation chez MN, excepté une pause de quatre années au conteneur : est-ce la MN qui t’a apporté cette capacité à évoluer ou est-ce cet intermède au conteneur qui t’a permis de l’acquérir pour mieux revenir ?

ER : J’ai navigué à la MN dès ma sortie de l’école, avec effectivement un départ au conteneur pour une autre compagnie à taille humaine, pour revenir ici en 2015. Ce retour m’a permis d’évoluer, je suis passé second capitaine et plus tard commandant.

AA : Vous naviguez ici sous pavillon français au Registre International Français (RIF), vous êtes armé au long cours, avec des temps d’embarquement de 2 mois.

ER : Effectivement le rythme est plutôt raisonnable avec 2 mois embarqués pour 2 mois en congés, mais surtout un rythme qui est bien tenu grâce aux escales régulières dans les ports français ou européens facilitant nos relèves.

AA : Ce rythme tenu est très intéressant pour pouvoir concilier une vie professionnelle et familiale !

ER : Tout à fait, nous avons énormément d’exemples de navigants mariés avec des enfants qui vivent cela depuis de nombreuses années et qui s’y retrouvent très bien !

AA : Etant au RIF vous bénéficiez de la défiscalisation, est-ce une motivation pour toi ? Ou d’ordre général le salaire est-il ta motivation ? Le fait d’être dans un groupe plus modeste est-il un frein pour toi ? Est-on moins bien traité dans un « petit » groupe ?

ER : Traité ? Non !! Ce n’est pas ce que je dirai ! Non non ! Pour moi, le salaire n’a pas été la motivation principale, car quand on regarde la différence de salaire par rapport à un grand groupe on ne peut pas dire qu’elle soit phénoménale…. Pour ma part, j’ai toujours préféré trouver le juste milieu entre salaire et conditions de travail : à la Compagnie Maritime Nantaise, mais également je pense dans de nombreux armements à taille humaine, nous avons une liberté d’action à bord qu’on ne retrouvera pas forcément dans un gros groupe et je me suis toujours dit que le peu de salaire en moins est largement compensé par la qualité de vie à bord ou dans les relations avec l’armement, avec qui la communication est facile et cela est très agréable.

 

MN TOUCAN © Aymeric AVISSE DR

AA : Les offres d’emploi de la MN sont assez « originales » pour une compagnie de navires rouliers, car ils embauchent à tous les postes contrairement aux autres qui embauchent des jeunes pour les faire évoluer : est-ce un point fort ?

ER : Tout à fait, ils embauchent à tous les postes. L’avantage d’une compagnie comme la nôtre c’est qu’il n’est nullement nécessaire d’avoir une ancienneté spécifique ou des brevets de navires citernes, pétrole, chimique, etc…. l’expertise de nos transports pouvant s’acquérir à bord sans l’expérience.

AA : Pour toi, quel est le point fort et qui te plaît le plus à la Maritime Nantaise ?

ER : Ce qui me plaît le plus est la diversité des contrats que l’on a, ARIANE Espace, matériel militaire, transbordement de remorques pour la Brittany Ferries entre Pool et Bilbao et enfin l’aéronautique et l’aérospatiale avec Airbus et les fusées italiennes. Tout en étant uniquement des rouliers/porte-conteneurs nous avons une palette de fret assez différente, souvent hors gabarits et hors normes.

AA : Même si les promotions ne sont pas systématiques et imminentes, peuvent- elles arriver rapidement ?

ER : La promotion peut arriver vite en effet, tout dépend évidemment de la conjoncture ; dans mon cas, je suis revenu en 2015 avec une pyramide des âges pas forcément favorable mais pour autant je suis passé en 2021 avec un collègue plus jeune que moi ! La promotion se fait assez bien et naturellement.

AA : Comment te vois-tu évoluer, maintenant que tu es commandant et que tu n’as pas 40 ans ! ?

ER : Je n’ai jamais pensé à arrêter de naviguer, j’espère continuer ma carrière à la Maritime Nantaise et bouger sur les autres navires de la flotte et voir du pays !

A très bientôt pour un nouveau volet de « Connaissez-vous vraiment les armements français? ».

Aymeric AVISSE

 

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