Jeune Marine N°270PortsRèglementation

La drogue corrompt le commerce maritime

Il faut revoir l’excellent « French Connection », dans lequel de l’héroïne produite en France part par la voie maritime vers New-York où les excellents Gene Hackman et Roy Schneider, policiers anti-stups, travaillent à démanteler la filière (la poursuite automobile sous le métro aérien est une séquence culte !). La voie maritime est toujours empruntée par le fléau, mais le flux s’est inversé : la cocaïne traverse l’océan depuis le continent américain et débarque dans les ports européens. Une constante, du film de 1971 à la réalité de 2023 : les liasses de billets corrompent, les balles sifflent, et les victimes tombent.

Les Assises de l’Économie de la Mer 2023 ont un fil rouge : la souveraineté. En quoi le trafic de cocaïne peut-il mettre en péril la souveraineté ? Didier Lallement, Secrétaire Général de la Mer, a bien expliqué pourquoi ce trafic massif de drogue transitant dans les ports européens, dépasse de loin un drame personnel de santé, pour devenir un risque de délitement de la société, car il transporte dans ses conteneurs la corruption des institutions. Les chargements massifs, embarqués à 75% dans des conteneurs, ont besoin de complicités pour forcer les portes des ports. Un pays dont les autorités cèdent à la corruption est en voie de décadence démocratique.

2021 a constitué pour le port de Rotterdam qui a clôturé l’année sur 15,3 mio EVP (8 mio à l’import, 7 mio à l’export) , soit 6,6% de plus qu’en 2020. © Eric HOURI

Certes, Le Havre, avec 30 tonnes de drogue dure saisies en un an, ne concourt pas encore avec les géants du Nord que sont Anvers et Rotterdam, respectivement 101 tonnes et 85 tonnes., mais n’est-ce pas presque proportionnel au nombre de conteneurs déchargés ? Ronan Boillot, le Directeur national des garde-côtes de la douane, estime la production annuelle de cocaïne à 2300 tonnes. Le marché américain semblant saturé et les opiacés faisant concurrence à la blanche, les bons commerçants de l’ombre se retournent vers le vieux continent, faisant redouter aux autorités un accroissement vertigineux. Ronan Boillot a décrit avec un sourire navré l’inventivité des trafiquants pour dissimuler leur marchandise, et Jeune Marine s’en voudrait de vendre la mèche dans ses colonnes.

Quelles quantités transitent-elles par la mer et comment espère-t-on en interrompre le flux ? Cédric Rosémont, le patron de Traxens, a décrit le dispositif qu’il met à disposition des armateurs pour détecter les ouvertures de portes sur les conteneurs. Pour 10.000 « smart-conteneurs » équipés de son matériel intelligent, 80 alertes ont été émises, autorisant 17 saisies pour 26 tonnes. Or, seul 10% des conteneurs de son plus gros clients sont aujourd’hui équipés sur la ligne d’Amérique du Sud. Je vous laisse calculer le taux de fuite…

Tous les acteurs semblent mobilisés, les ports consacrant aujourd’hui 15% de leurs investissements à la sûreté du transit, au risque d’en freiner parfois le flux, tandis que Douanes, Marine Nationale et Renseignements travaillent main dans la main sous l’autorité des Préfets Maritimes.Une porte entrebâillée sur l’un des conteneurs chargés à bord ? Sonnez l’alerte !

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